Chemins du psychotraumatisme
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Eléments de nosographie

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Message par Admin Dim 26 Jan - 14:49

NOSOGRAPHIE DES TROUBLES PSYCHIQUES POST-TRAUMATIQUES


Les troubles psychiques post traumatiques ne se limitent pas à l’unique ESPT

Les 4 symptômes cardinaux

Les 4 symptômes cardinaux sont :

1) Reviviscences : symptôme pathognomonique du syndrome de répétition où le sujet revit à l’identique la scène traumatique accompagnée de sa charge de détresse et dissociation. Elles surviennent lors d’un relâchement de la vigilance pendant le sommeil (cauchemars) et la veille (ecmésies). D’autres types de répétitions existent comme : souvenirs intrusifs distincts des faits originaux, ruminations stéréotypées concernant l’événement et ses conséquences, illusions de reviviscences (le sujet croit reconnaitre la scène traumatique dans son environnement), phénomènes moteurs involontaires réitérant la réaction motrice lors de l’événement, conduites de répétition (fugue, pleurs, auto- et hétéro-agressivité), impulsions à raconter ou écrire l’événement.

2) Dissociation post-traumatique : souvent diffuse, au-delà des reviviscences, par le développement d’une tendance basale aux phénomènes dissociatifs qui peuvent se manifester par :
 Une modification des perceptions temporospatiales (ralentissement/accélération du temps ; impression de grand silence)
 Déréalisation (impression d’irréalité de l’environnement, altération des perceptions sensorielles)
 Dépersonnalisation (impression de voir la scène de l’extérieur, sensation de morcellement du corps
 Conduites motrices automatiques adaptées ou non.
 Amnésie partielle ou étendue

3) Hyperactivité neuro-végétative : état d’alerte permanent, niveau de vigilance élevé, irritabilité, agitation motrice, réactions de sursaut, etc

4) Stratégies d’évitement cognitives et comportementales des stimuli pouvant éveiller la mémoire traumatique (lieux, activités, personnes, objets, sensations internes, etc)

La clinique immédiate peut être aussi marquée d’agitation incoercible, de fuite panique ou, au contraire, de sidération et de stupeur. Dans les premières heures, si l’angoisse prédomine souvent, des états confusionnels, voire des expressions conversives et/ou psychotiques sont possibles.

Alors que les reviviscences sont fréquentes dans les heures et jours suivants le trauma, elles disparaissent ensuite classiquement au profit de la période de latence qui peut se prolonger de quelques jours à quelques années. Cliniquement peu structuré du point de vue symptomatique, la latence s’achève par un retour des reviviscences rappelées à la mémoire par un trait associatif généré par une perception implicite ou une pensée consciente évoquant le trauma. Plus rarement, le facteur redéclenchant sera un événement heureux et apparemment éloigné des circonstances traumatiques initiales.

Une évolution « par éclipse » peut ensuite faire alterner entre des périodes paucisymptomatiques et des phases post-traumatiques intenses.

Si l’ESPT reste la description syndromique la plus connue, les troubles psychiques post traumatiques sont bien plus riches dans leur expression clinique. Ces troubles associent au syndrome de répétition de nombreux symptômes, parfois dénommés « aspécifiques », du fait de leur présence dans d’autres troubles psychiques. Or, tout comme l’hypervigilance et l’évitement, ils gardent un lien étroit avec le fait générateur sans être des « comorbidités » ou des « complications ».
Peuvent s’associer à divers degrés des troubles de l’humeur (essentiellement dépressifs), des deuils pathologiques, des troubles anxieux (phobie, trouble panique, anxiété généralisée, etc), des troubles psychotiques, des troubles psychosomatiques et somatoformes, des troubles des fonctions instinctuelles, des troubles des conduites, des mésusages de substances psychoactives, des modifications de la personnalité.

Les différents symptômes ne sont pas toujours en phase dans le temps, mais oscillent entre éclipses et résurgences. Le symptôme de répétition peut s’estomper, voire disparaître, tandis qu’apparaissent ou s’accroissent d’autres souffrances. En l’absence de soin, l’évolution peut être invalidante avec association de symptômes psychiques chroniques, de conséquences somatiques délétères, de troubles cognitifs envahissants et de difficultés sociales.



Formes cliniques post-traumatiques d’entités syndromiques ailleurs décrites dans la nosographie

1 Troubles thymiques et deuil post traumatique, risque suicidaire

L’éprouvé traumatique constitue une perte de l’illusion d’immortalité qui permet à chacun de vivre au jour le jour en oubliant qu’il va mourir. Cette prise de conscience engendre une atteinte narcissique profonde et souvent, une perte de confiance en la nature humaine et en sa propre nature

1.1 Dépression post traumatique
Détachement par rapport à autrui, incapacité d’éprouver des émotions positives, réduction de l’intérêt à des activités antérieurement investies ,etc.
Ruminations morbides fatalistes avec pour thématique les causes et conséquences du trauma, avec prééminence d’émotions de honte et d’abandon.
Une intense culpabilité peut se structurer quand le sujet blessé endosse le rôle du survivant ayant fui ou participé au drame.
Le lien au monde et à l’autre se teinte de cognitions dépressives ( impossibilité de maîtriser son destin, absence de sens de la vie, perte de confiance en soi et en la nature humaine, impression que l’autre ne peut comprendre, restriction des activités sociales.

1.2 Deuil pathologique post traumatique
Peut se structurer lorsque la perte d’un proche constitue l’événement traumatique (découverte du cadavre, décès brutal en présence de la personne, camarade militaire tué au combat). Les reviviscences gardent proche le sujet disparu, et rendent plus difficiles le franchissement d’un seuil.
Un blocage est fréquent en phase dépressive.
Le deuil PT est à différencier du deuil traumatique résultant de la perte mais sans traumatisme psychique associé.
Sans qu’il n’y ait de syndrome de répétition, s’associent des phénomènes nostalgiques autour du défunt (obsessions, préoccupations, recherches) et des éléments de deuil (choc, détachement, anhédonie, sentiment de vide)

1.3 Risque suicidaire
Les dépressions et deuils post-traumatiques sont à risque élevé de crise suicidaire et de comportements auto-agressifs qui peuvent être entendus comme une ultime répétition de la présentation à la mort.



2 Troubles anxieux et phobiques post-traumatiques

Une anxiété intense est souvent ressentie lors de l’événement er ses suites immédiates.
Les reviviscences sont vécues dans l’angoisse ; l’hyperactivité neurovégétative majore la réactivité anxieuse ; les stratégies d’évitement pérennisent l’anxiété anticipatoire. L’anxiété généralisée accompagne les symptômes cardinaux et s’associe souvent à une exacerbation.
Les évitements et l’anxiété anticipatoire témoignent du noyau anxieux présent dans le symptôme post-traumatique.

2.1 Agoraphobie
Plus intense quand l’événement a pris lieu dans un lieu public. Il peut également y avoir des lieux marqués de phobies plus spécifiques.

2.2 Phobie spécifique
La phobie des déterminants traumatiques est habituelle (ascenseur, objets tranchants, obscurité, physique d’un agresseur)

2.3 T.O.C
Des obsessions idéatives et des compulsions comportementales contra-phobiques peuvent être liées à la thématique du symptôme de répétition (fermeture des portes si effraction, vérification du gaz dans les suites d’incendie, nettoyages corporels itératifs

2.4 Anxiété de séparation
La crainte de perdre ses proches durant le trauma peut générer une anxiété de séparation

2.5 Phobie sociale
Elle est fréquente, les personnes psycho-traumatisées craignent en particulier de devoir évoquer le trauma et ses conséquences à la demande d’autrui



3 Psychoses post-traumatiques

3.1 Trouble psychotique post-traumatique non schizophrénique
Le syndrome de répétition peut prendre une allure psychotique par la présence de phénomènes déficitaires ou productifs. Les phénomènes hallucinatoires ou délirants sont alors liés à la scène traumatique et à ses conséquences. En l’absence de discordances, ces troubles ne sont pas du registre schizophrénique. Les expressions paranoïaques par contre sont possibles.

3.2 Dépression post-traumatique avec caractéristiques psychotiques congruentes à l’humeur
Le sentiment d’incurabilité domine dans cette entité clinique ou le sujet s’accuse volontiers de l’événement et de ses conséquences. Des symptômes de négation d’identité sont parfois retrouvés. Confiné dans une dépersonnalisation intense, le patient exprime ne plus être lui-même, que son esprit ne fonctionne plus (confronté au vide psychique de la scène traumatique, il a un vide de pensée).
Des idées de ruine peuvent aussi se confondre avec les scènes de destruction présentes dans les reviviscences.

3.3 Réactions bipolaires
Un accès thymique peut être déclenché par une confrontation à un événement traumatique, laquelle révèle le trouble bipolaire ou sensibilise à l’évolution d’une bipolarité connue.

3.4 Schizophrénie post-traumatique
Un trouble schizo peut être déclenché ou sensibilisé par certains éléments du traumatisme psychique (angoisse de morcellement devant un membre arraché, angoisse de néantisation devant des scènes de destruction totale, angoisse de dévoration devant des scènes d’anthropophagie). Si la discordance reste aspécifique, la thématique du délire intègre souvent l’événement et ses conséquences



4 Conséquences somatoformes, psychosomatiques et somatiques post-traumatiques

Blessures physiques et psychiques sont souvent intriquées, notamment en cas d’accidents de la voie publique, etc. Sans méjuger d’authentiques lésions, l’indicibilité et la dissociation peuvent s’exprimer par des symptômes s’ancrant viscéralement dans le corps.
Des lésions physiques peuvent également avoir un impact psychique

4.1 Expressions somatoformes

 Trouble douloureux post traumatique : dans les suites d’un traumatisme ayant entrainé des blessures organiques, des sensations persistantes issues de l’accident (douleurs, dysesthésies) peuvent réitérer le drame tel un équivalent de répétition traumatique corporelles. Ces douleurs peuvent déclencher d’autres reviviscences.

 Conversion post-traumatique : souvent concordance de siège corporel avec la fonction physiologique impactée par le trauma (aphonie suite à l’incapacité de prévenir un drame, cécité devant un objet se rapprochant dangereusement de l’œil…). Parfois le symptôme conversif prend l’aspect d’un équivalent de reviviscence car fixe la réaction psychocomportementale pertraumatique

 Troubles de somatisation : constituent des symptômes fonctionnels concernant les sphères cardio-pulmonaires, gastro-intestinales, rhumatologiques, etc. Ces perceptions corporelles anxieuses sont souvent ressenties dès le moment traumatique, peuvent se manifester en parallèle des reviviscences ou devenir permanentes.

4.2 Altérations psychosomatiques et somatiques

Des troubles psychosomatiques peuvent résulter du stress entretenu par le trouble post traumatique engendrant : troubles cutanés, digestifs, cardiovasculaires, endocriniens, auto-immuns, etc
Parfois aussi les personnes traumatisées souffrent de lésions causées par des comportements à risque entrainés ou favorisés par les conséquences de la blessure psychique

4.3 Comorbidité entre trouble psychique post traumatique et symptôme post-commotionnel

Dans les suites de trauma crâniens, tout type de troubles psychiques peuvent apparaître. Après un trauma crânien léger, un trouble post-commotionnel peut survenir d’autant plus fréquemment qu’un trouble post traumatique est présent. Apparaissant quelques jours ou semaines après le traumatisme il se traduit par une absence de parallélisme anatomoclinique entre la richesse des plaintes somatiques et la pauvreté de l’examen clinique et des explorations supplémentaires. Il s’établit aux confins de symptômes généraux (fatigue, trouble du sommeil), somatiques (céphalées, vertiges), cognitifs (difficultés de mémorisation & de concentration), et affectifs (irritabilité, intolérance au stress, labilité émotionnelle, apathie, anxiété)


5 Retentissement du trauma sur les fonctions instinctuelles et neuropsychologiques, les comportements, la personnalité, les capacités d’adaptation

Le vécu traumatique peut entraîner une rupture dans la trajectoire du sujet, autant dans son fonctionnement physiologique que dans ses liens sociaux.

5.1 Atteinte des fonctions instinctuelles

 Troubles du sommeil : s’associent à l’insomnie d’endormissement par crainte des cauchemars, l’insomnie terminale par hypervigilance, les cauchemars, etc
 Les TCA : modifications du comportement alimentaire
 Dysfonctions sexuelles

5.2 Troubles neuropsychologiques

Atteintes cognitives fréquentes concernant l’attention, la concentration, la mémoire, et les fonctions exécutives ( altération de la flexibilité mentale, défaut d’inhibition essentiellement)

5.3 Troubles des conduites

 Usage de substances psychoactives licites ou non, addictions comportementales (jeux, comportements à risque, automutilation)
 Conduites auto- ou hétéro-agressives : équivalents suicidaires de reconfrontation à la mort

5.4 Modifications de la personnalité : s’expriment par une discontinuité avec le mode d’existence antérieur notamment

5.5 Difficultés d’adaptation professionnelle et privée




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